Pendant toute la semaine, il y a eu pendant les récréations, le soir après l ’école, le midi à la cantine, un conciliabule entre Pierrot, Tapioca, Gros sel, Gros lard et Saucisse. Les enfants ne se quittent plus et une petite souris qui se serait glissée dans l ’une de leur poche aurait entendu ceci :
Pierrot:
” Il a l’air gentil, le docteur Melchior”
Tapioca:
“Et les autres aussi”
Saucisse:
” Tu as vu toutes les belles armures au sous-sol,j’en voudrais bien une”.
Gros sel:
” Elle serait bien trop grande pour nous, on ne pourrait même pas la porter.
Rien que l’épée, elle est plus lourde que toi”.
Saucisse:
Cela m’ étonnerai, je demanderai au docteur d’en essayer une”.
Gros lard:
“Il ne voudra jamais”
Saucisse:
“Cela dépendra”
Tapioca:
“La rose, elle ne se laisse pas faire, elle n’a pas l’air de nous apprécier”.
Pierrot :
“Cela ne m ’étonne pas, si elle est au courant de ce que les gens racontent, elle ne doit aimer personne du village”.
Tapioca:
“Ce n’est quand même pas notre faute”.
Pierrot:
“A part elle, tout le monde a été sympa avec nous”.
Tapioca:
“Le docteur ne l ’aurait pas accepté, et vous les garçons vous avez mangé toutes les tartes qu’elle avait préparé pour le dîner. Elle aura du tout recommencer après notre départ. C’est pour cela qu’elle faisait la gueule. Tu as vu le regard et la tête qu ’il a fait quand elle a voulu nous jeter”.
Pierrot:
“Nous jeter, il ne faut pas exagérer”.
Gros sel:
Tu as vu les yeux de Rose à ce moment, j’ai cru qu’elle allait nous bouffer tout crus. Elle ressemble à la doudou de mes livres dans Epaminondas. De toute façon ce n’est pas le travail qui la déborde, elle est toujours assise.
Gros lard: Elle est comme toutes le négresses, toujours assises…C’ est qui Epaminondas” ?
Gros sel:
“Tu ne connais rien, c’ est l ’histoire d’ un petit noir qui ne faisait que des bêtises”.
Gros lard:
“Ah, j’ai compris, c’ est dans ce livre que tu apprends à les faire”.
Gros sel:
“Arrête, tu n ’en fais pas des conneries toi ?”
Gros lard:
“Pas tant que toi, tu te rappelles quand tu as….…
Pierrot:
“Cela suffit, vous n’allez pas vous disputer, faites plutôt attention, toute la cour nous regarde. Pris par leur histoire, ils ne se sont pas même rendus compte qu ’ils font bande à part, ils se sont isolés des autres.
Même les Maîtres remarquent ce manège et sont intrigués et essaient de comprendre ce qui se trame entre les cinq garnements. Ils s’approchent d’eux…,
Tapioca les aperçevant dit :
– « Attention, nous sommes repérés l’’institutrice arrive » D’’un seul coup, d’’un seul, cinq paires d’’yeux convergent vers elle.
Madame Lorioux:
– » Alors qu’est-ce qu’on raconte ? »,demande Madame Aurioux.
Tapioca:
– « Rien , nous préparons une chasse aux papillons pour jeudi après-midi.
Madame Lorioux:
– « Ah, c’est bien, mais pourquoi vous cacher et faire bande à part, demande t-elle
Tapioca:
– « Nous ne nous cachons pas, simplement, nous avons repéré un endroit où il y en a de très beaux.
Madame Lorioux:
-” Et alors ?”
Tapioca:
– “Nous irons tous les cinq dans l ’après-midi, mais nous ne voulons pas que nos copains nous piquent l’ endroit que nous avons découvert. Les copains se sont rapprochés et ont out entendu.
Toto pommier s’écrie
– « Je sais, je sais, je sais, je les ai vu, ils vont derrière le château d’eau.
Pierrot:
– Toi, on ne peut rien te dire”. Vous voyez pourquoi…!! Dès que nous avons découvert un nouvel endroit pour chasser le papillon, tout le monde le sait. Alors on se cache, pour en parler.”
…La maîtresse satisfaite, tourne le dos et repart. Tous leurs autres copains entourent Toto pour connaître l’endroit où se cachent les papillons. Il y aura certainement beaucoup de monde jeudi après-midi vers 17 heures, du côté du château d’eau. Les enfants fiers de leur duperie rient sous leur cape.
Tapioca ravie:
– « Bravo Pierrot, tu nous as débarrassé d’eux et des Maîtres pour le restant de la semaine. Ils veulent aussi, éviter qu ’on pose des questions aux plus petits . Par peur d’être punis, ils pourraient dire la vérité.
L ’orage passé, les cinq copains préparent en paix leur sortie du prochain jeudi matin. Ils sont sûrs de n être ni dérangés, ni suivis. Avec un peu de chance, ils seront même de la chasse aux papillons l’ après-midi.
Ce jeudi là au petit matin, le temps est couvert et il tombe une petite pluie fine et régulière. Dans la région on dit qu’il bruine. Le père Hillairet s ’est levé heureux.
-“L’eau fera du bien à la terre et aux arbres. Ils en ont bien besoin après cette période de sécheresse. C’est bien , se dit-il, la nappe phréatique va remonter, pourvu qu’il pleuve pendant quelques jours.
Germaine:
“Heureusement que les enfants ne sont pas en vacances »
André:
– “Que font-ils aujourd’hui demande t’il ?
Germaine:
– “Ils préparent le spectacle de la kermesse. Monsieur le curé en a besoin toute la matinée. Il me les a demandé hier”
André:
-” Putain de curé, non seulement il faut lui donner des sous, et en plus il fait bosser gratuitement nos gosses pour sa kermesse.”
Germaine:
– “Ne te fâche pas, il est si gentil, si vieux, c ’est lui qui t’a baptisé.”
Germaine:
– “Mon père aurait mieux fait de s’abstenir”.
Germaine:
– “Ne jure pas, ça porte malheur.
André:
– “Balivernes, ton dieu, ton curé, tu ne vois que par lui”.
Germaine:
– “Il vaut bien tes communistes de Moscou, il n’a pas de sang sur les mains lui au moins…
André hausse les épaules et se tait pour couper court à toute polémique…
Le père Hillairet n ’aime pas l’église, mais il a un profond respect, malgré courroux pour ce vieux curé. Pendant la guerre, avec Paul le fils de Marcel le buraliste et quelques autres, ils ont fait de la résistance dans les bois des sous verts. Ils devaient exfiltrer un prisonnier évadé qui regagnait l’ Espagne. C’ était un piège tendu par les Allemands. Le père Neau s ’en est aperçu et au péril de sa vie, il sauta sur son vélo et courut les prévenir, les sauvant tous d’une mort certaine. Sans son courage il serait mort aujourd’hui. A l’époque il n’avait pas quinze ans…
A suivre pour le dixième épisode.