Oh beau cèpe de saison,
Oh toi que j’affectionne
Tout particulièrement.
Né sous les mousses sauvages,
Ce matin encore,
Tu m’es venu,
Entre les feuilles je t’ai vu,
La tête encore mouillée
Des gouttes de rosée
Qui perlent sur ton sommet.
Quelques feuilles tombées
Des grands chênes élancés
sont collées sur ton chapeau souillé.
Leurs couleurs mélangées
Te rende difficile à bien t’identifier,
Il faut bien regarder de près
Ces sols usés par les ans écoulés
où tout est mélangé.
Ton pied rond et ventru est planté dans le sol
D’où tu m’es apparu
Bientôt suivi
De quelques-uns des tiens..
L’année dernière ici aussi
Nous nous sommes retrouvés.
Aujourd’hui encore, tu es venu
Au rendez-vous
Que l’on s’était donné.
Pour, que je puisse te ramasser,
Te poser délicatement,
Au fond de mon panier d’osier.
Un à un, j’y mettrai les tiens.
Après t’avoir essuyé, avec un linge immaculé,
Prévu à cet effet,
Dans la poêle je te préparai à cru,
A ma façon, c’est un secret,
Avec moi, tu seras dorloté
Je sais que tu apprécieras,
D’être ainsi chouchouté.
Un peu de beurre et de persil bouclé,
Tu seras coloré à l’ail noir ciselé,
De mon ami Jocy
véritable rareté
Que pour toi elle a préparé,
Assaisonné comme il te plait…
De fleurs de sel de l’île de Noirmoutier
et de poivre écrasé
d’un tour de main
du moulin.
Je vois déjà tous les gourmands,
Tous les gourmets,
Se pourléchant,
Rêvant, d’en pouvoir profiter.
Bien dresser dans une assiette de porcelainier,
Accompagner de quelques lards sautés,
Et rissolés,
Tu seras une fois encore,
Le roi de la soirée,
Le Prince de mon dîner.
Merci beau cèpe,
Toi, aimé en fin gourmet,
N’’oublie pas de revenir,
Chaque année
Au rendez-vous que l’on s’est fixé.
Texte de Pierre Marchesseau extrait modifié de son livre de poésie écrit en septembre 1987
Prix guillaume Apollinaire.